Burundi : la pêche à l’escargot change la vie de toute une famille

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Au Burundi, il y a environ deux ans, les produits de la pêche se limitaient aux différentes espèces de poissons comme le Mukeke, l’Indagala, le tilapia, le Sangala, le Kambale. Et récemment, l’escargot est venu s’ajouter à cette liste. Ce qui a changé le quotidien des riverains du lac Dogodogo, à l’ouest du pays. « Quand les Chinois sont arrivés dans notre province pour les travaux de bitumage d’une route, j’ai appris d’un ami de Bujumbura qu’ils apprécieraient l’escargot », confie Youssouf Ndiyo, le quarantaine, père de quatre enfants.

Ce qui a servi de déclic pour profiter de ce « trésor caché dans ce petit lac », selon ses termes. « J’étais déjà pêcheur. Mais les escargots n’avaient aucune valeur à mes yeux. Pour les autres pêcheurs non plus. Quand nous installons nos filets pour attraper des poissons, on y trouve également des escargots. On faisait le trie et les escargots étaient rejetés dans l’eau parce que considérés comme sans valeur », explique le pêcheur.

Un trésor jusque-là ignoré

Aujourd’hui, tout a changé. Youssouf Ndiyo est devenu l’un des plus grand pêcheurs d’escargot de la localité. Assis sur sa petite pirogue remplie d’escargots, Youssouf dévoile ses entrées mensuelles : « Le prix d’1 kg tourne autour d’un dollar américain. Par semaine, il y a des fortes chances d’avoir plus ou moins 70 dollars. Ce qui me fait au moins 300 dollars par mois ».

De toute sa vie, Youssouf Ndiyo n’avait jamais obtenu autant d’argent en l’espace d’un mois. Précisant que la quasi-totalité de ses prises sont vendues dans les restaurants Chinois de Bujumbura, il ne cache pas sa satisfaction après une année de la pêche des escargots : « Aujourd’hui, j’ai acheté un vélo, j’ai construit une maison en tôles et cimentés, je n’ai plus de soucis pour envoyer mes enfants à l’école, les faire soigner, etc ».

Il a déjà engagé trois pêcheurs qui travaillent pour son compte. Et ce n’est pas tout. « J’ai même un compte bancaire alors qu’avant, tout l’argent en provenance de la pêche était totalement dépensé. Pas moyens de mettre quelque chose à côté parce qu’une partie des prises était consommée à la maison », précise le pêcheur, sans fierté.

Photo : R. Ndabashinze

Photo : R. Ndabashinze

La famille dans la liesse

Refusant de dévoiler son identité comme pour la plupart des Burundaises rurales, la femme de Youssouf, âgée de la trentaine, témoigne : « A la maison, nos vies ont changé. Il y a à peine une année, je marchais pieds-nus, je n’avais que trois pagnes [tenues], et on dormait sur une natte. Mais actuellement, tout a changé. » Cette époque où le couple peinait à assurer la scolarité de ses enfants, n’est plus qu’un mauvais souvenir. « Il y a même une nette amélioration des relations entre mon mari et moi. Et comme nos enfants ont suffisamment de quoi manger, ils ne tombent plus souvent malade », dévoile-t-elle tout sourire.

Et à Sébastien Nzitonda, 30 ans, et son voisin d’ajouter que même si Youssouf n’était pas trop pauvre avant le début de la pêche des escargots, il y a actuellement un grand changement. « Comme il a découvert le marché en premier, toutes ses prises sont écoulées. Et voilà qu’il y tire beaucoup d’argent et sa vie et celle de sa famille a changé », dit-il avec envie. Cet agriculteur se réjouit d’avoir Youssouf comme ami : « En tout cas, aujourd’hui, je ne peine pas à trouver quelqu’un pour me prêter de l’argent. Quand je suis dans le besoin, il me vient en aide sans hésitation. Je prie pour lui pour que son activité prospère », déclare Sébastien Nzitonda.

Un repas délicieux et médicinal

Youssouf a déjà gouté à un plat comprenant des morceaux d’escargots : « Un jour, j’ai apporté ma production à un client Chinois. Après la préparation, il m’a donné un morceau. J’ai trouvé ce repas délicieux ». Et Alexis Harimenshi, nutritionniste, d’y ajouter son grain de sel : « la viande d’escargot est très riche en protéines. C’est conseillé aux malades du foie et c’est un élément important pour lutter contre les troubles digestives par exemple ».

Youssouf Ndiyo déplore néanmoins le fait que les populations locales ignorent encore ce « repas au goût comparable à celui du poisson grillé ». Mais il a sa petite idée pour les y initier. « Je compte déjà installer un restaurant au Chef-lieu de la province Cibitoke, spécial escargot », annonce-t-il, espérant ainsi trouver d’autres clients, à part les restaurants Chinois ou asiatiques installés à Bujumbura.

Rénovat Ndabashinze / Correspondant de @SIPAnews_ à Bujumbura-Burundi

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